Les banques centrales changent de ton.Par Emmanuel Auboyneau, Gérant associé .
La conjonction d'une croissance mondiale en décélération et d'une inflation toujours forte induit un pessimisme persistant dans la sphère économico financière. Pourtant, l'inflexion récente dans le discours des Banques Centrales pourrait changer la donne en cette fin d'année.
L'activité économique dans le monde est sur une tendance clairement baissière qui devrait se poursuivre à court terme. La confiance des acteurs économiques a chuté en raison de la perception de la hausse des prix et de la situation géopolitique. Aux Etats-Unis le chiffre de croissance pour le troisième trimestre affiché à +2,6% est en trompe l'œil. C'est essentiellement le commerce extérieur qui soutient l'activité.
La croissance interne est beaucoup plus molle et la consommation, vecteur essentiel de l'expansion américaine, fléchit surtout dans les services. Le marché de la construction est également en forte décélération ce qui risque de détériorer encore le déficit de logements dans le pays. Ce repli d'activité est progressif et ne devrait pas conduire à une rupture brutale. Nous n'excluons pas une récession mais elle serait courte et modérée.
En Europe les dernières statistiques indiquent une résistance de l'économie. Pourtant, la tendance à la baisse est incontestable et devrait même s'accélérer au cours des prochains mois. L'Allemagne est particulièrement fragile, pénalisée par son marché automobile et par sa dépendance énergétique. La France s'en tire mieux en relatif mais ne sera pas épargnée pour autant.
La croissance mondiale ne peut plus compter sur le soutien chinois comme auparavant. L'activité en Chine décélère également en dépit des mesures monétaires et budgétaires incitatives. La politique zéro covid pèse sur tout un pan de l'économie et le pays ne sait pas comment en sortir. Le renouvellement de Xi Jinping et son discours offensif et ferme (notamment sur Taiwan) sont également des éléments d'incertitude incitant l'administration américaine à poursuivre sa politique de sanctions à l'égard de l'industrie chinoise.
Les Banques Centrales font aujourd'hui le même constat : elles ont réussi à faire retomber l'activité économique à un niveau plus compatible avec une réduction de l'inflation. Elles peuvent donc commencer à adoucir leurs discours. L'inflation est toujours trop forte mais a probablement atteint son pic. Elle devrait progressivement baisser pour revenir à des niveaux plus acceptables, même si cela prendra du temps.
C'est la Réserve Fédérale américaine qui a communiqué la première sur cette probable inflexion monétaire. Son souci d'accompagner la baisse des prix se double d'une volonté de ne pas provoquer de choc économique. C'est un équilibre précaire qui nécessite beaucoup de doigté et de souplesse. Il semble que l'essentiel de la hausse des taux aux Etats-Unis est désormais acté. Nous attendons encore deux hausses, peut-être de moindre ampleur, avant une stabilisation. Cette perspective a provoqué une détente des taux longs américains et un fragile regain d'optimisme sur les actions.
La Banque Centrale Européenne a comme prévu augmenté son taux directeur de 75 points de base en octobre. L'Europe est en retard sur les Etats-Unis dans sa politique de normalisation. Elle opère donc fortement. Pourtant, Mme Lagarde a communiqué sur sa volonté d'agir dans le futur en fonction des chiffres réels. Ainsi, un début de baisse de l'inflation et/ou une trop forte baisse de l'activité, pourraient l'inciter à modérer son action.
Depuis plusieurs trimestres les taux d'intérêt sont le principal catalyseur à la baisse des marchés financiers (actions, obligations). Même si les chiffres d'activité déçoivent à court terme et si les résultats des sociétés sont peu enthousiasmants, une inflexion des politiques monétaires dans un sens plus conciliant devrait redonner un peu d'optimisme. Nous restons légèrement sous pondérés en actions dans nos gestions modérées et équilibrées et gardons nos positions dans nos gestions plus dynamiques. Nous retrouvons des opportunités de rendement sur des obligations courtes du fait de la récente remontée des taux.
La volatilité ne va pas s'arrêter rapidement mais une atténuation progressive des politiques monétaires pourrait redonner un sens plus positif aux marchés financiers qui sont aujourd'hui faiblement valorisés.
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