Les récents soubresauts sur les marchés obligataires européens, en particulier l'élargissement de l'écart entre les rendements des dettes française et allemande, illustrent les craintes des investisseurs face aux incertitudes politiques en France.
Avec la perspective d'une potentielle victoire des partis d'extrême gauche ou droite aux législatives, le risque perçu sur la signature française s'est accru.
Cependant, Philip Lane, l'économiste en chef influent de la BCE, a tenu à rassurer en minimisant la nécessité d'une intervention d'urgence de l'institution.
Ses propos dénotent la volonté de ne pas surréagir face à des mouvements de marché pouvant refléter des réévaluations légitimes des primes de risque par les opérateurs.
Parallèlement, Lane rappelle la philosophie pragmatique de la BCE : ne déclencher le programme anti-fragmentation (l'IPT) que si la transmission de la politique monétaire est réellement menacée par des évolutions "injustifiées et désordonnées" sur les marchés obligataires.
Un seuil d'activation qui ne semble pas atteint selon lui pour l'instant.
Cette approche mesurée tranche avec les mises en garde alarmistes du ministre français Bruno Le Maire sur les risques d'une "crise financière".
Un ton qui pourrait viser à mobiliser l'électorat modéré, mais qui heurte la doctrine de la BCE de ne pas s'immiscer dans les enjeux politiques nationaux.
Au-delà, les propos de Lane réaffirment l'importance centrale accordée au respect des règles budgétaires européennes, quel que soit le gouvernement issu des urnes en France.
Un signal vers les partis populistes qui remettent en cause ce cadre de disciplinefiscale.
Enfin, l'économiste en chef se veut rassurant sur les perspectives d'inflation à moyen terme, tout en admettant implicitement les défis récents (salaires, core inflation).
Un défi de crédibilité pour ancrer les anticipations alors que certains acteurs du marché doutent désormais.
En résumé, par ses déclarations nuancées, Philip Lane dessine les contours d'une doctrine pragmatique mais inflexible de la BCE : intervenir si nécessaire pour préserver la transmission de sa politique monétaire, mais sans s'écarter des règles européennesprédéfinies.
Un positionnement juridique et technique, mais aux lourdes implications politiques s'il devait être mis à l'épreuve.
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