Commentaires de Patrice Gautry, chef économiste à l'Union Bancaire Privée, suite à la réunion de la Banque Centrale Européenne qui s'est tenue hier, le 22 avril.
Comme prévu, il n'y a pas eu d'annonce de changement dans la stratégie en place et l'exercice a été limité à réitérer les raisons qui soutenaient la hausse des achats d'actifs décidés le mois passé.
Les incertitudes demeurent à court terme en raison de la pandémie même si la balance des risques s'améliore à moyen terme avec les espoirs de rebond de l'activité.
La décision d'une poursuite ou non des achats de la BCE sera prise en juin prochain (le 10), date à laquelle une remise à jour des prévisions de croissance et d'inflation seront réalisées, ce qui donnera aussi plus de recul sur l'évolution de la pandémie et de la vaccination et des conditions financières.
Sur la base du scénario actuel, il semblerait justifier de laisser en place ce rythme plus soutenu d'achats sur les marchés.
Mais les « Faucons » existent au sien de la BCE et pourraient juger la détente des conditions financières suffisantes, tandis que l'inflation sera en pleine phase de rebond ces prochains mois, surtout en Allemagne.
La décision de juin risque d'être ouverte et aussi de révéler la divergence de vue parmi les gouverneurs de la BCE.
Mais plusieurs observations peuvent déjà être formulées sur la stratégie, constituant les interrogations pour la prochaine réunion.
La flexibilité du PEPP est un atout mais les décisions d'ajustement sont bloquées sur un pas trimestriel, ce qui peut ne pas correspondre aux phases de tensions ou de détente sur les marchés financiers ; la réactivité du fonds est donc limitée et liée au scenario de court et moyen terme.
L'objectif d'inflation de 2% est vu par la BCE comme un plafond à ne pas franchir et il faut commencer à freiner sur la politique monétaire bien avant ce chiffre ; la Fed a modifié son approche en favorisant un rebond de l'inflation vers 2% et tolérant des prix au-delà de 2% de manière temporaire. La vision de la BCE relève d'une autre époque et pourrait être un frein dans cette période, en attente de la modification promise à la fin de l'été des objectifs stratégiques de la BCE.
Si la politique monétaire de la BCE est très accommodantes, les banques commerciales maintiennent une attitude prudente à l'égard du crédit aux entreprises et aux ménages; le risque est que, lors de la réouverture des économies, les guichets de crédit ne soient pas suffisamment ouverts pour alimenter la reprise économique, alors que la BCE a le sentiment d'avoir une politique monétaire la plus agressive qui soit ; la transmission de la politique de la BCE au niveau des agents économiques, et pas seulement sur les marchés financiers, serait alors source de paradoxe et de contrainte globale sur la reprise.
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