BCE : Un comportement trop prudent ? , analyse de William Gerlach, qui est désormais VP International Account Management & Dealing chez iBanFirst, à la veille de l'annonce de la BCE concernant ses taux d'intérêt.
Il y a très peu de doutes sur l'issue de la réunion de la Banque Centrale Européenne (BCE) ce jeudi. Ce sera une baisse des taux de 25 points de base même si certains membres parmi les plus faucons du conseil des gouverneurs ont laissé planer le doute ces derniers jours, à l'instar du gouverneur slovène Boštjan Vasle. Explications William Gerlach, VP International Account Management & Dealing chez iBanFirst.
Dans un monde idéal, le débat aurait porté sur une hausse de 25 points de base ou de 50 points de base. L'inflation est désormais sous la cible de la BCE. Cela laisse a priori les mains libres à l'institution. Pas tant que cela si on en croit Francfort. Selon l'institution, il y a toujours le risque de boucle prix-salaire dans les services. Si en février dernier, quelques statistiques pouvaient corroborer ce risque, ce n'est désormais plus le cas. Aucun économiste sérieux ne considère qu'il puisse y avoir une flambée des salaires. Pourquoi ? Car l'économie de la zone euro est au bord du précipice.
La faiblesse de l'inflation est le reflet d'une demande comprimée. Presque tout va mal : le déficit explose en France, le secteur manufacturier renoue avec des niveaux qu'il avait connu pendant les phases de confinement, la Chine décide d'engager un bras de fer commercial, l'énergie est quatre fois plus élevée que du côté américain, ce qui va accentuer la désindustrialisation. Au passage, sans énergie à bas coût, l'Europe peut tirer un trait définitif sur toute industrie de l'IA de grande ampleur.
Pourtant, malgré ce panorama pessimiste, la BCE préfère se focaliser sur une improbable boucle prix-salaire qui confirme, comme ce fut le cas pendant la crise financière de 2007-08, qu'elle est en retard par rapport au cycle économique.
La conséquence est triple :
Tout d'abord, l'Allemagne est en récession sur l'année, le reste de la zone euro, à quelques exceptions près comme la péninsule ibérique, est en phase de stagnation économique et on voit mal ce qui pourrait changer cela. Le décrochage européen par rapport aux États-Unis se poursuit. Lorsqu'un Américain voyage en Europe, son gain de pouvoir d'achat est équivalent à celui d'un Européen allant en vacances au Mexique.
Tout cela, sans compter l'effet taux de change. Ensuite, le différentiel de croissance économique entre les deux bords de l'Atlantique plaide structurellement pour une paire EUR/USD faible. En fin d'année dernière, le consensus des trésoriers français tablait sur une paire atteignant 1,15. Cela nous paraît peu probable à court terme. Nous voyons plutôt la paire s'affaiblir autour de 1,08-1,05. Sur le long terme, le taux de change reflète irrémédiablement la performance économique.
Enfin, il y a un risque réel lié à l'immobilier commercial, secteur sinistré depuis la Covid. La BCE a récemment étudié l'exposition des banques à ce segment afin de s'assurer qu'elles ont une bonne appréciation de ce qu'elles détiennent dans leur bilan. Le moins qu'on puisse dire, c'est que le grand ménage reste à faire. On sait que le secteur de l'immobilier est traditionnellement très sensible à l'évolution des taux.
Une baisse des taux de 50 points de base ce jeudi, suivant ce que la Réserve Fédérale américaine (Fed) a fait en septembre, aurait apporté une bouffée d'air frais bienvenue au secteur de l'immobilier commercial. Ce ne sera pas le cas, avec le risque que ses difficultés finissent par poser un problème systémique au secteur financier.
Il y a une dernière conséquence, moins immédiate. Historiquement, les pays proches de l'idéologie allemande ont toujours eu une voix prépondérante au sein du conseil des gouverneurs de la BCE, même lorsque le français Trichet était aux commandes. À l'avenir, ce sera certainement moins le cas. Les pays du Sud de l'Europe sont désormais le moteur économique de la zone.
Une banque italienne souhaite racheter l'une des principales banques allemandes – inimaginable il y a cinq ans de cela, le Portugal emprunte à un taux moins élevé que la France, la Grèce peut se vanter d'avoir un excédent budgétaire et une production industrielle parmi les plus élevées de la zone euro, l'Espagne a un indicateur PMI à 56 etc… C'est une complète inversion économique par rapport à 2012.
Avec le pouvoir économique vient également le pouvoir politique. On peut espérer qu'à l'avenir, l'Europe du Sud ait un poids plus croissant dans les décisions de la BCE, qu'on arrêtera de se focaliser à outrance sur les risques inflationnistes quand l'économie est presque en récession. Ce n'est pas pour aujourd'hui. Mais c'est une lueur d'espoir pour plus tard.
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