Habitués à scruter tout particulièrement l’évolution des conditions de marchés en zone Euro au cours des dernières années, les investisseurs déplacent aujourd’hui la focale.
Alors que les perspectives économiques demeurent atones pour le Vieux Continent et que la Banque Centrale Européenne maintient le statut quo, les catalyseurs boursiers sont ailleurs.
L’inflexion de la politique monétaire de la Réserve Fédérale américaine et le comportement de l’économie nippone, après l’extraordinaire dumping monétaire initié par sa banque centrale, seront les facteurs décisifs de l’orientation des principales places boursières, au second semestre de l’année.
Un premier constat s’impose : America is back ! La grande majorité des signaux conjoncturels sont au vert outre-Atlantique, renouant avec leurs niveaux d’avant crise : amélioration du marché immobilier (nette hausse des prix immobiliers selon l’enquête Case-Shiller), taux de chômage au plus bas depuis 2008 (à 7,5%), marges bénéficiaires des entreprises reconstituées, moral des ménages au plus haut depuis 5 ans.
En bourse, wall street a battu tous les records de valorisation ces derniers mois, dopés par les injections monétaires de la Réserve Fédérale.
Seulement voilà .
La perspective d’une baisse supplémentaire du chômage dans les prochaines semaines va inciter la Fed à réviser sa politique monétaire ultra-accommodante.
Un resserrement monétaire est donc attendu d’ici la fin d’année.
Aujourd’hui, les marchés redoutent ce changement de cap, qui risque de rendre les actions un peu moins attractives face à des obligations dont les rendements seront revalorisés.
Une appréhension légitime après avoir été bercés sur des matelas de liquidités, mais probablement exagérée.
En effet, il est fort à parier que Ben Bernanke ne commettra pas la même erreur que son homologue Alan Greenspan, en 1994, et fera tout pour assurer un resserrement en douceur.
C’est de toute façon la voie naturelle à suivre pour une économie revigorée.
On peut raisonnablement imaginer des coupes très progressives dans le programme de rachat d’actifs, par exemple à un rythme de 5 milliards de dollars par mois.
De la même façon, même quelque peu rehaussés, les taux directeurs resteront encore très faibles en 2014.
Les incertitudes actuelles des investisseurs devraient impacter les marchés boursiers de façon marginale, en comparaison du remarquable moteur haussier que représente la reprise de la croissance U.
S.
à moyen terme.
Le Japon serait-il sur la même voie que les États-Unis ? C’est en tout cas ce que peut laisser imaginer le redressement de la croissance nippone au premier trimestre.
Pour stimuler l’économie, la banque centrale nippone a elle aussi frappé un grand coup (110 milliards d’euros/mois de rachats d’actifs), comme la Fed précédemment.
Associé aux mesures économiques annoncées par le premier ministre Shinzo Abe, le dumping monétaire réalisé par la Bank of Japan pour déprécier le yen et rétablir la compétitivité des entreprises nationales à l’export, a soutenu l’extraordinaire rally des actions japonaises.
L’indice nikkei 225 a progressé de 80% entre le 12 novembre et le 22 mai dernier, un rythme comparable à celui qu’avaient connu certaines bourses mondiales entre le point bas de 2009 et 2011.
Et parmi les dommages collatéraux du volontarisme monétaire japonais, un coup non négligeable porté à l’activité commerciale des autres économies d’Asie.
Avec une parité JPY/USD revenu autour de 100 Yens pour 1 USD, le secteur privé nippon a pu rogner quelques parts du marché régional, face à son grand rival chinois et à d’autres pays émergents asiatiques.
Cette impressionnante reprise boursière s’est toutefois heurtée au réalisme des investisseurs qui depuis le milieu du mois de mai doutent de la capacité de ces mesures à redonner un élan structurel et durable à l’économie.
Le pays demeure profondément ancré dans un cycle économique déflationniste, depuis des décennies.
Et il ne faut pas oublier qu’au cours des trente dernières années, la majorité des rallyes boursiers au Japon n’ont pas permis de valorisation durable des actions.
Le scénario d’un rebond sans lendemain est probablement le plus crédible.
Passée l’engouement des investisseurs, la marge de manœuvre de la Bank du Japon est aujourd’hui restreinte : elle n’a pas d’autre choix que d’en faire davantage pour continuer à pressuriser la devise nationale.
Sans quoi le miracle japonais se révèlera être un mirage.
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