Perspectives sur le segment obligataire : une position prudente sur les taux d'intérêt et une vision positive sur le crédit par Philippe Gräub, Responsable de l'équipe Global & Absolute Return Fixed Income, et Olivier Debat, Spécialiste de l'investissement senior
La décision – tant attendue – d'un resserrement («tapering») de l'assouplissement quantitatif (QE) de la Fed devrait être l'une des annonces majeures à suivre pour les participants au marché sur le reste de l'année. Les indicateurs d'activité continueront donc à être scrutés de près car ils permettront de déterminer si l'économie américaine a atteint le niveau de croissance requis par la Réserve fédérale pour pouvoir annoncer une réduction de ses rachats d'actifs. La Fed devrait, selon nous, aller de l'avant avec sa décision de «tapering» ces prochains mois, d'autant que les chiffres sur le marché du travail sont appelés à s'améliorer encore. En effet, l'expiration des allocations-chômage renforcées devrait fortement inciter les personnes à rechercher à nouveau un emploi.
En anticipation de ce revirement restrictif («hawkish») de la Fed, nous restons prudents sur les taux d'intérêt. Alors que la décision de «tapering» se rapproche, nous nous attendons à ce que les investisseurs focalisent leur attention sur le cycle de hausse de taux, en particulier sur la partie courte de la courbe. Ceci pourrait signifier que la tendance à la pentification observée en début d'année devrait s'inverser, à l'heure où la Fed cherche à gérer les risques inflationnistes et s'oriente progressivement vers des relèvements de taux.
Même si les banques centrales devraient devenir moins accommodantes ces prochains mois, nous maintenons une vision positive sur les marchés du crédit, étant donné notamment l'amélioration des fondamentaux et les niveaux de bénéfices impressionnants du côté des entreprises, ce qui vient confirmer la solidité de l'activité constatée sur le plan macroéconomique. Mais également compte tenu du fait que la hausse de l'inflation récemment observée reste vue par la Fed comme transitoire, ne nécessitant donc pas de resserrement prématuré ni excessif de la politique monétaire.
L'autre risque majeur pour le reste de l'année est celui d'un variant du covid plus infectieux, susceptible d'entraîner une pause, voire une remise en question, du processus de réouverture. Alors que le variant Delta est un véritable sujet de préoccupation du fait de l'accélération des cas enregistrée, les données d'hospitalisation et de mortalité sont nettement plus encourageantes et indiquent que le vaccin tend à prévenir les formes graves provoquées par ce variant. Ce contexte laisse donc penser que l'incidence de la pandémie au niveau macroéconomique devrait être limitée. En outre, la zone euro rattrape le Royaume-Uni en termes de distribution de vaccin, et ceci devrait permettre de mieux maîtriser la situation en cas de nouvelle vague de covid.
Nous nous attendons à ce que les marchés risqués se recentrent sur la trajectoire de croissance économique mondiale, qui devrait, ce troisième trimestre, dépasser la tendance pré-covid. Nous sommes toujours aussi confiants quant à la reprise, en raison non seulement de la confiance croissante des consommateurs, mais également de l'augmentation des dépenses d'investissement, qui devrait être soutenue tant par le secteur privé que par le secteur public à mesure que les entreprises et les gouvernements se familiarisent avec la transformation digitale et verte aujourd'hui à l'œuvre. Dans cet environnement, les segments à bêta supérieur du marché peuvent surperformer, et une compression du crédit peut aussi avoir lieu. Les spreads «high yield» devraient en bénéficier alors que les secteurs les plus durement touchés par la crise sanitaire commencent à se redresser. Cela étant, nous pensons également que la dette financière subordonnée constitue une opportunité intéressante compte tenu des fondamentaux solides du secteur bancaire et des bénéfices résilients tout au long de la pandémie.
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