« La zone euro est vouée à l'échec. Elle vivotera de crise en crise à moins d'être scindée, d'après l'ancien Gouverneur de la banque d'Angleterre.
Dans son dernier livre, Lord King affirme que des réformes allant dans le sens de l'union fiscale n'apaiseront pas les tensions entre les 19 nations du bloc et pourraient même conduire à sa désintégration.
Il s'attend à une crise politique et économique imminente provoquée par des renflouements sans fin, des demandes d'austérité et les pressions des élites européennes et américaines afin de mettre en place des mécanismes de transferts au sein de l'Union dans le but de résoudre ses soucis.
Dans l'article exclusif de Mervyn King publié par le Telegraph, il avertit que ces problèmes ont « semé les graines de la division » au sein de l'Union et créé du soutien pour les partis populistes.
De nouvelles étapes allant dans le sens de l'union politique, qui forcerait les nations à abandonner une partie de leur souveraineté et à se soumettre aux diktats de Bruxelles, pourraient provoquer un retour de flamme dans l'opinion publique.
« Cela débouchera non seulement sur une crise économique, mais aussi politique, » affirme-t-il.
« L'Union monétaire a créé un conflit entre l'élite centralisée d'une part et les forces démocratiques nationales de l'autre.
C'est extraordinairement dangereux.
» Cependant, King, qui utilisait souvent les analogies sportives durant sa décennie à la tête de la Banque d'Angleterre, affirme que l'alternative d'une « relégation temporaire » pour les pays en difficulté, comme la Grèce, pourrait s'avérer insuffisante car « trop tardive ».
Les politiciens, déjà échaudés par des rounds répétés de stratégie de la corde raide, ne seront probablement pas en mesure d'obtenir un accord, à son avis.
« Les divergences entre les pays et le coût politique d'une défaite sont devenus trop élevés.
Ce qui est malheureux pour tous les pays concernés – car parfois une promotion prématurée est dangereuse tandis qu'une relégation peut être l'opportunité d'un nouveau départ – et pour l'ensemble de la planète car la zone euro est aujourd'hui une entrave à la croissance mondiale.
» L'Allemagne et le reste de la zone euro doivent accepter le fait que les pays non compétitifs du Sud ne peuvent retrouver le chemin de la prospérité que via la scission du bloc, d'après Lord King.
La plus grosse économie européenne se trouve en face d'un choix cornélien : signer un chèque en blanc afin de soutenir le bloc « à un coût élevé et sans fin pour ses contribuables » ou mettre « un terme au projet de l'union monétaire », estime-t-il.
La seule façon d'empêcher les pays endettés de contempler le fond de l'abîme de « l'austérité étouffante, du chômage de masse permanent » accompagnés « d'un fardeau de la dette n'offrant aucune possibilité de résolution » consiste à abandonner l'euro.
« Le contre-argument, qui dit que la sortie de la zone euro mènerait au chaos, à une baisse du niveau de vie ainsi qu'à des incertitudes concernant la survie de l'union monétaire, a un poids réel.
Mais… Sortir de la zone euro pourrait être la seule voie menant vers le retour de la croissance économique et du plein-emploi.
Les avantages à long terme l'emportent sur les coûts à court terme.
» Il est également partisan d'un programme d'aide à la réduction de la dette mené par le FMI qui permettrait aux pays de restructurer leur dette de façon équitable.
Même si cela pourrait ralentir la croissance et réduire les dépenses alors que les créditeurs se mettent au diapason de la réalité en acceptant que ces dettes ne seront jamais remboursées, c'est néanmoins « inévitable » selon Mervyn King.
« Le défi sous-jacent est d'obtenir un nouvel équilibre dans lequel les dettes nouvelles ne seront plus créées à la même échelle que précédemment.
» Mervyn King a été gouverneur de la banque d'Angleterre entre 2003 et 2013.
Il est aujourd'hui professeur d'économie à la London School of Economics mais aussi membre du conseil d'administration d'Aston Villa.
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